Feu vert à la nationalisation d’EDF mais augmentation supplémentaire des retraites contre l’avis du gouvernement : les débats à l’Assemblée nationale sur les mesures pro-pouvoir d’achat restent un carrefour pour la majorité et l’exécutif. Environ 160 amendements restaient au menu en début de soirée dans ce plan budgétaire 2022 révisé. Comme prévu, les députés ont approuvé le financement par l’État de la renationalisation à 100 % d’EDF, une entreprise de 9,7 milliards d’euros visant à sortir le groupe de production et de distribution d’électricité de ses amarres économiques et industrielles. Les écologistes ont dénoncé la “marche du tout nucléaire” tandis que LR a regretté la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim. Mais nouveau revers majeur pour la majorité : l’Assemblée a voté, contre l’avis du gouvernement, une revalorisation supplémentaire de 500 millions d’euros des retraites. Le vote de cet amendement par le groupe indépendant LIOT l’a emporté par 186 voix contre 181, la gauche célébrant d’emblée une « grande victoire » et les députés RN une « bouffée d’oxygène » pour les retraités avec cette augmentation supplémentaire des retraites de 0,4 %. Le Sénat de droite, qui prendra le relais après l’Assemblée du projet de loi, pourrait toutefois revenir sur ce vote. Déjà lundi après-midi, 230 millions d’euros ont été votés pour le chauffage des maisons au fioul, à l’unanimité des voix de LR, RN et de la gauche. Le gouvernement a privilégié une aide de 50 millions d’euros. Le ministre de l’Economie Bruno Lemaire avait clairement appelé à la rigueur budgétaire, alors que 44 milliards d’euros de crédits sont déjà ouverts : “Gardons les comptes publics !”. D’un côté, le gouvernement, faute de majorité absolue, tente de boucler la première lecture de ce projet de budget, qui devait initialement être bouclé vendredi soir dernier, afin que le Sénat puisse l’examiner cette semaine en commission. Le ministre de l’Economie Bruno Le Maire le 25 juillet 2022 à Berlin (AFP/David GANNON) D’autre part, l’opposition, surtout la gauche, défend pas à pas ses propositions et essaie d’en extraire ce qu’elle peut, soutenant l’inflation galopante. “On assiste à une véritable déformation du débat démocratique”, avec des débats “interminables” et “de la pure politique politique”, s’est plaint lundi soir M. Lemaire, alors que les pourparlers s’enlisaient sur l’accès à l’eau ou aux pompiers. Defiant France a vivement réagi mardi. “Il y a une re-parlementarisation de la vie politique”, s’est félicité Alexis Corbière sur LCI.
– “Limites physiques” – Le député a mis en garde contre la “propagande Macron”, avec un “discours antiparlementaire qui consiste à dire : +C’est une assemblée de bavards, ils font perdre le temps du gouvernement+”. Le député LFI Adrien Quatennens le 22 juin 2022 à Paris (AFP/Ludovic MARIN) “L’ère d’une Chambre du Parlement pour enregistrer les vœux du président de la République est révolue”, a ajouté son collègue Adrien Quatenens à France Inter. Pourtant, dans la majorité et l’opposition, la fatigue s’installe après ces journées et ces nuits quasi ininterrompues depuis plus d’une semaine. “Nous sommes des femmes et des hommes avec des limitations physiques”, glisse un électeur. Les échanges se sont tendus mardi lorsque la récente occupation de la résidence secondaire du maire au Pays basque par des militants du droit au logement a été signalée au sujet d’un amendement visant à surtaxer ces logements. “Nous sommes nombreux à avoir connu des menaces”, a déploré Sylvain Maillard (LREM). Comme ces derniers jours, les députés sont déterminés à approuver solennellement l’intégralité du projet de budget rectificatif dans la nuit, après le vote du projet de loi “d’urgence” sur le pouvoir d’achat aux premières heures de vendredi. Les LR voteront majoritairement pour, a indiqué leur président Olivier Marleix, satisfait du “bras de fer positif avec le gouvernement” qui a permis de prendre des mesures sur le carburant, le rachat de RTT par les entreprises ou encore la défiscalisation des heures supplémentaires. La gauche doit voter contre. “On ne peut pas soutenir ce paquet (sur)le pouvoir d’achat qui a été co-construit avec la droite” et dont “l’égalité et la justice sociale sont les absents les plus importants”, selon un porte-parole des députés PS, Arthur Delaport. Côté RN, “un vote favorable est extrêmement improbable”, estime Jean-Philippe Tanguy, déplorant notamment le rejet des baisses de TVA. Ce vote marquera la fin du premier tour au Palais-Bourbon. Les ministres sont invités à “se mettre au travail” jusqu’à la fin de la session parlementaire prévue pour cette étape le 7 août, a fait savoir la Première ministre Elizabeth Bourne.