Les écosystèmes méditerranéens sont-ils en danger inévitable ? C’est ce que les scientifiques commencent à croire, à la lumière de la montée des vagues de chaleur marine dans la Grande Bleue. Cet été, le phénomène est particulièrement inquiétant. Un écart de 6,5°C par rapport à la normale saisonnière a été mesuré par satellite le 19 juillet au large de Marseille. Depuis le mois de mai, soit plus de soixante-dix jours au total, la mer présente des “anomalies de température très importantes”, note Samuel Somot, expert canicule méditerranéenne à Météo-France. Cela concerne les eaux entre 0 et 20 mètres de profondeur, entre les îles Baléares et la côte du Levant espagnol, mais aussi surplombant la Côte d’Azur en France, sur toute la longueur de la botte italienne, de la mer Ligure au golfe de Tarente et tout autour de la Corse. Ces chiffres approchent – voire dépassent – les deux précédents records établis dans un passé récent. Cette intensité, observée le 5 août 2018 au large de Marseille, avec une température de l’eau de 6,6°C supérieure à la normale saisonnière, et celle de la durée, avec une canicule qui s’était propagée, en 2003, du 3 août au 2 septembre. « Dans l’atmosphère, une vague de chaleur ne dure jamais aussi longtemps. En mer, oui. Sur le littoral français, le phénomène a culminé fin mai, fin juin et fin juillet, qui devrait être suivi d’une nouvelle augmentation début août”, pointe l’expert de Météo-France. En face de Marseille, la chaleur de la mer est “extrêmement intense”, avec 28 ºC mesurés le 19 juillet, au lieu d’une moyenne saisonnière de 21,5 ºC. Devant Bastia c’est “continu depuis fin mai”, avec une température de l’eau autour de 30 ºC. Idem aux Baléares.
Plus 1°C en vingt-sept ans
« Ces vagues de chaleur marines se déclenchent dans un état soutenu de températures élevées et de conditions stables, de soleil sans nuage, de vents calmes. Les eaux de surface ne bougent plus et les eaux froides du fond ne peuvent plus remonter, causant d’énormes souffrances aux coraux, crustacés, poissons… » explique Rubén del Campo, représentant du Service national de météorologie d’Espagne. Dès les premiers jours d’août, l’effet du thermostat méditerranéen, c’est-à-dire sa capacité à réguler les températures extérieures, pourrait être annulé : « Normalement, en hiver, la mer modère le froid et en été, elle modère la chaleur. Pour le moment ce n’est pas le cas, surtout la nuit. » Il vous reste 71,95% de cet article à lire. Ce qui suit est réservé aux abonnés.