“C’est fou. C’est comme être dans un lagon.” A Sète, sur la corniche, les baigneurs n’en reviennent pas. Depuis quelques jours, la Méditerranée flirte avec les 30°. Un pic de 30,7° a même été enregistré dimanche 27 juillet en Corse selon l’Observatoire météorologique de Keraunos. Le thermomètre affiche plutôt 28° sur le littoral de l’ancienne région Languedoc-Roussillon.

Réchauffement climatique et vague de chaleur

Les causes de cette chaleur marine sont doubles. Pascal Romans, conservateur du Biodiversarium de Banyuls-sur-Mer fait la distinction entre les canicules estivales ponctuelles et le réchauffement climatique. “La Méditerranée est de 5 à 6° au-dessus de la normale en raison des canicules successives depuis juin et de l’absence de vents du nord. Le réchauffement climatique affecte la Méditerranée – encore plus que les océans car c’est une mer semi-fermée, extrêmement densément peuplée avec une beaucoup d’activité – ça représente quelques dixièmes de degré en 25 ans. Ça fait 1° tout au plus, c’est énorme.”

Prolifération des canicules marines

Ces canicules marines ont tendance à se multiplier. Douze anomalies thermiques ont été enregistrées dans les années 2000, contre sept dans la décennie précédente et deux dans la décennie précédente, explique Samuel Somot, chercheur au Centre national de recherches météorologiques de Paris. Résultats ? Ils sont destructeurs pour la faune et la flore sous-marine. « 1° de plus permet à certaines espèces de la mer Rouge de remonter par le canal de Suez et de s’installer en Méditerranée. Les valeurs les plus élevées correspondent ici aux valeurs les plus faibles en mer Rouge, ce qui permet à ces espèces de prolonger leur progression. “, poursuit Pascal Romans. Elles concernent une centaine d’espèces de poissons, mollusques et crustacés. « Le lapin, la trompette, la flûte et le lion seront des prédateurs de notre espèce qui n’y est pas habituée, les jeunes seront facilement attrapés. Dans les Pyrénées-Est, nous n’avons jamais vu de poisson flûte, mais sur le Côté Côte d’Azur, j’ai vu quelques personnes.”

Poseidonia, le poumon des mers, menacé

Les effets du réchauffement climatique se font également sentir dans la flore, Poseidonia, espèce emblématique de la Méditerranée, notamment. Si cette élévation de quelques degrés devait durer, les micro-organismes recouvrant cette plante marine pousseraient plus vite et finiraient par faire tomber ses feuilles. “Certains sont déjà abîmés comme si c’était la fin de l’été”, souligne Pascal Romans. Les experts craignent qu’il y ait un impact sur les animaux qui s’y réfugient.” L’impact écologique sera également important. « La posidonie produit de l’oxygène, c’est un puits de carbone. Il fixe plus de dioxyde de carbone qu’une forêt à surface égale. C’est aussi une mise à mort remarquable. Ses enchevêtrements de racines créent des récifs artificiels qui retiennent le sable en cas de tempête. C’est une barrière contre l’érosion des plages. Pour l’instant la faune et la flore se portent bien. Mais s’il monte encore de 2°, on va se poser des questions.” Le chercheur se souvient d’une vague de chaleur en juillet 2006 avec une eau à 29°. Puis un phénomène de mortalité a été observé chez les éponges et les vers. Si cette situation perdurait, la chaleur descendrait au fond de la mer et menacerait directement des espèces telles que les sirènes violettes (coraux méditerranéens). Ce n’est pas le scénario préféré pour le moment. L’arrivée du vent du nord, en début de semaine prochaine, devrait provoquer “une baisse très rapide de la température de la Méditerranée”, souligne le chercheur. Pas de bouillon pour les nageurs.

Météo : le réchauffement favorise les épisodes méditerranéens en automne ?

Une canicule en mer pourrait-elle entraîner des épisodes méditerranéens plus violents en automne ? “C’est un facteur aggravant, mais c’est loin d’être suffisant”, estime Florence Vaysse, référente territoriale Languedoc et Roussillon à Météo France. “Vous avez besoin des bonnes conditions atmosphériques.” Les derniers épisodes méditerranéens datent d’octobre 2020 dans la vallée de la Roya et à Valleraugue (Gard). Dans un cas la mer était chaude, dans l’autre froide.” Il faut attendre, conclut le météorologue. Beaucoup de choses peuvent se passer d’ici l’automne.”